Promotions militaires sous la transition : L’ère des Généraux

Promus au grade de Général lors du Conseil des ministres du 16 octobre 2024, les nouveaux officiers généraux, parmi lesquels le Président de la transition et ses compagnons d’armes de l’ex-CNSP, ont reçu leurs attributs lors d’une cérémonie officielle tenue à Koulouba le 21 octobre. Plongée au cœur de la haute hiérarchie de l’armée malienne, où le cercle des Généraux s’accroît depuis la rectification de la transition il y a 3 ans.

Comme recommandé lors des conclusions du Dialogue Inter-Maliens pour la paix et la réconciliation nationale en mai dernier, les Colonels Assimi Goïta, Malick Diaw, Sadio Camara, Modibo Koné et le Colonel-major Ismaël Wagué, à l’origine du renversement du régime IBK en août 2020, viennent d’être élevés au grade de Général. Le Colonel Abdoulaye Maïga, qui ne faisait pas partie du CNSP mais est devenu au fil des années l’une des principales figures du régime de transition, a aussi été promu, portant à 6 le nombre de nouveaux généraux de l’armée malienne.

Du Général de brigade Abdoulaye Soumaré, 1er Général et 1er Chef d’état-major de l’armée en 1960, au Général d’armée Assimi Goïta en 2024, l’armée malienne a compté au moins 130 Généraux à divers échelons.

Avec sa promotion au grade de Général d’armée à titre exceptionnel, le Président de la Transition, Assimi Goïta, devient le militaire le plus haut gradé de l’armée malienne. Seuls les anciens Présidents Moussa Traoré et Amadou Toumani Touré avaient atteint ce grade.

Moussa Traoré avait été promu de Lieutenant à Général d’Armée en 1982, 14 ans après son coup d’État qui avait renversé le Président Modibo Keïta en 1968. Quant à Amadou Toumani Touré, il a été élevé du grade de Lieutenant-colonel à celui de Général d’armée en 1992 par le Président Alpha Oumar Konaré en guise de récompense pour sa bonne conduite de la transition de 1991.

35 Généraux en 2 ans

Avant la promotion au grade de Général des 6 Colonels et l’élévation de 5 Généraux de brigade au grade supérieur de Général de division le 16 octobre dernier, plusieurs autres officiers supérieurs avaient déjà été promus au grade de Général sous la Transition depuis sa rectification en mai 2021 et l’investiture du désormais Général d’armée Assimi Goïta, le 7 juin 2021.

Le 5 juin 2024, 20 Colonels-majors issus de différents corps des Forces armées et de sécurité, sont nommés au grade de Général de brigade par le Président de la Transition. Parmi eux, 2 femmes : Nana Sangaré, de la Direction des transmissions, des télécommunications et de l’informatique des armées, et Nema Sagara, de l’Armée de l’air. Avec 8 officiers supérieurs promus, l’armée de terre s’est taillé la part du lion. Il s’agit des Colonels-majors Toumani Koné, Issa Ousmane Coulibaly, Abass Dembélé, Amara Doumbia, Mamadou Massaoulé Samaké, Moussa Yoro Kanté, Moussa Soumaré et Makan Alassane Marra.

Les 10 autres promus sont les Colonels-majors Aly Annadji, Nouhoum Ouattara, Famouké Camara et Daouda Traoré de la Garde nationale du Mali, Faguimba Ibrahima Kansaye et Faraban Sangaré de la Direction du Génie militaire, Mohamed Amaga Dolo et Malick dit Yéro Dicko de l’Armée de l’air, Guédiouma Dembélé de la Direction centrale du service de santé des armées et Seydou Kamissoko de la Direction générale de la Gendarmerie nationale.

Deux ans plus tôt, en janvier 2022, 7 mois après avoir pris la tête de la Transition, le Président Assimi Goïta procédait à ses toutes premières nominations d’officiers supérieurs au grade d’officiers généraux. Par un décret en date du 19 janvier 2022, 15 Colonels-majors sont promus au rang de Général de brigade.

Les Colonels-majors Daoud Aly Mohameddine (promu une 2ème fois le 16 octobre 2024 au grade de Général de division), Harouna Samaké, Mamadou Laurent Mariko et Félix Diallo de l’Armée de terre sont élevés au grade supérieur.

Les Colonels Alou Boï Diarra et Oumar Yoro Sidibe, ainsi que le Colonel-major Branima Diabaté de l’Armée de l’air deviennent également Généraux de brigade, de même que les Colonels Badara Aliou Diop de la Direction du matériel, des hydrocarbures et des transports des armées, Moussa Toumani Koné et le Colonel-major Sambou Minkoro Diakité de la Direction générale de la Gendarmerie nationale, le Colonel El Halifa Coulibaly de la Direction des transmissions et des télécommunications des armées et Jean Elisé Dao de la Garde Nationale, ainsi que les Colonels-majors Mohamed Alpha Diaw de la Division centrale du service de santé des armées et Ousmane Wele et Bougouri Diatigui Diarra de la Direction du Génie militaire.

À titre comparatif, la Transition en cours depuis 2020 a déjà promu plus d’officiers généraux dans l’armée que durant toutes les années de pouvoir réunies (33 ans) du Général Moussa Traoré et du Président Alpha Oumar Konaré.

En effet, la 2ème République sous le Général d’armée Moussa Traoré, de 1968 à 1991 et les deux premiers quinquennats de la 3ème République sous le Président Alpha Oumar Konaré, de 1991 à 2002, sont les périodes au cours desquelles l’armée a enregistré le moins de nouveaux officiers généraux. Moins d’une dizaine d’officiers supérieurs ont été promus officiers généraux sous les deux régimes.

Promotions dans les normes ?

Selon l’Ordonnance N°2023-015/PT-RM du 21 mars 2023 portant Statut général des militaires, pour accéder aux grades de Général d’armée et Général de corps d’armée, il faut 40 ans de service au sein des Forces de défense et de sécurité. Cette condition est réduite de 5 ans (35 ans de service) pour accéder au grade de Général de division et de 10 ans (30 ans de service) pour celui de Général de brigade.

Mais la plupart, voire tous, des officiers qui accèdent aux grades de Général au sein de l’armée malienne bénéficient de nominations par distinction ou récompense du Président de la République, Chef suprême des armées.

L’article 90 de l’Ordonnance citée plus haut est sans équivoque. Il dispose : « les nominations et promotions peuvent être prononcées, à titre exceptionnel, pour récompenser les actions d’éclat et les services exceptionnels, sans considération de la durée et du diplôme minimum de service fixés pour l’accès au grade immédiatement supérieur ».

Ascension au fil des régimes

Entre 2002 et 2012, sous la présidence du Général Amadou Toumani Touré, l’armée malienne a enregistré 39 nouveaux Généraux de brigade. Durant la même période, 3 Généraux de brigade ont été élevés au grade de Général de division. Il s’agit des Généraux de division Youssouf Bamba de l’Armée de l’air et Souleymane Sidibé de la Gendarmerie nationale, le 1er janvier 2007, ainsi que du Général de division Gabriel Poudiougou de l’Infanterie, promu le 12 juin 2008.

La courte transition de 2012 – 2013 dirigée par Dioncounda Traoré a également fait 5 officiers généraux dans l’armée, avec comme fait le plus marquant l’élévation au grade de Général de corps d’armée de l’ancien Capitaine Amadou Aya Sanogo, meneur du coup d’État contre Amadou Toumani Touré. L’ancien putschiste est d’ailleurs resté le plus haut gradé de l’armée malienne jusqu’au 16 octobre 2024. Le régime du Président Ibrahim Boubacar Keita, qui succèdera à cette courte transition en 2013, fera également quelques nouveaux officiers généraux l’armée. Il sera surtout marqué par un grand nombre d’élévations au grade supérieur de plusieurs officiers généraux.

Le 20 septembre 2018, 5 Généraux de brigade sont élevés au grade de Général de division. Parmi eux, l’actuel Gouverneur de la région de Kidal, le Général de division El Hadj Gamou (Général de brigade depuis le 18 septembre 2013) et l’ancien Gouverneur de la région de Taoudénit, Mohamed Abderrahmane Ould Meydou. Plus tôt, en mai 2018, l’ancien patron de la sécurité d’État Moussa Diawara (Général de brigade depuis le 22 octobre 2014), l’ancien ministre de la Sécurité Salif Traoré et les Généraux de brigade Oumar Dao (depuis le 22 octobre 2014) et M’Bemba Moussa Keïta avaient tous été promus au grade de Général de division.

Mohamed Kenouvi